Ce mardi 21 octobre 2025, Kinshasa a reçu 100 camions-bennes flambant neufs destinés à l’évacuation des déchets et à l’assainissement des rues. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du programme « Kinshasa Ezo Bonga », porté par le gouverneur Daniel Bumba, et ambitionne de transformer la capitale en une ville moderne, propre et sécurisée. La remise de ces engins, premier lot d’un total de 300 véhicules promis, intervient après la réhabilitation du site d’enfouissement de Mpasa, un maillon clé du dispositif de salubrité.
Lors de la cérémonie, le gouverneur a souligné l’importance de l’appropriation citoyenne : « Kinshasa doit redevenir Kin la belle ». Dans sa vision, les camions-bennes ne sont pas qu’un outil logistique, mais un symbole d’engagement collectif, où la responsabilité des habitants est aussi décisive que l’action publique.

Si la démarche est louable, l’expérience passée invite à la prudence. Sous le mandat précédent, des véhicules similaires avaient été acquis, mais n’avaient jamais servi efficacement, faute de planification, de maintenance et de coordination. Le risque est donc que cette nouvelle opération se limite à un geste ponctuel, plutôt qu’à une véritable politique d’assainissement durable.
Le défi dépasse la collecte : où vont les déchets ? Pour l’instant, aucun projet concret de traitement, de recyclage ou d’élimination durable n’a été annoncé. La réhabilitation du site de Mpasa offre une solution temporaire, mais sans filière structurée, les déchets risquent simplement d’être déplacés sans être traités.
À l’approche de la saison des pluies, l’urgence est renforcée. Plusieurs quartiers sont déjà menacés par l’obstruction des caniveaux et des rivières, encombrés par les plastiques et les eaux usées. Sans curage régulier et actions préventives, Kinshasa pourrait de nouveau faire face à des inondations importantes, avec leurs conséquences sanitaires et économiques.
Mais le véritable enjeu reste culturel et comportemental. Tant que les habitants continueront à jeter les déchets dans les rues ou les caniveaux, la salubrité de la ville restera fragile. La propreté urbaine ne peut se décréter : elle se construit par des gestes quotidiens, l’éducation citoyenne et la discipline collective.
Les 100 camions-bennes représentent une opportunité réelle de transformation, mais leur succès dépendra d’une gestion cohérente, de l’entretien régulier des véhicules, de l’organisation des services et d’une implication active des Kinois. Kinshasa peut redevenir « Kin la belle », mais seulement si l’action publique et la responsabilité individuelle avancent de concert, transformant une promesse symbolique en un changement tangible et durable.
Yasmine Alemwa Ibango