Le franc congolais reprend sans doute des couleurs face au dollar américain. À Kinshasa, le Gouvernement insiste : cette tendance n’est pas le fruit du hasard, mais le résultat d’une politique monétaire et budgétaire resserrée.
Lors de la réunion du Comité de Conjoncture Économique (CCE), présidée par la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, celui-ci a détaillé les mesures mises en œuvre pour stabiliser la monnaie nationale et restaurer la confiance économique.
La Banque centrale, en tant qu’autorité monétaire a ajusté les réserves obligatoires, et le Gouvernement a serré la vis en veillant à la bonne gestion des échéances fiscales. Officiellement, ces efforts visent à atteindre un taux de change soutenable, c’est-à dire, protéger le pouvoir d’achat et encourager les opérateurs économiques à rester dans le circuit bancaire. Mais, la véritable épreuve se joue ailleurs, dans les marchés et les boutiques où les prix des denrées de première nécessité ne reflètent pas toujours la baisse du dollar.
Le Vice-premier ministre a, par ailleurs dénoncé les saisies de comptes bancaires opérées par certaines institutions ou par la justice, qui poussent les entreprises à se détourner du système bancaire. Résultat : une circulation réduite des capitaux et une confiance fragilisée. Des mesures correctives sont annoncées dans les prochaines semaines pour sécuriser les dépôts et encourager les opérateurs à réinjecter leurs fonds dans l’économie formelle.
Autre défi évoqué : la masse salariale publique. Alors que l’inflation devrait reculer à 7,8 % d’ici fin 2025 un plancher inédit depuis quatre ans —, le risque est de voir les salaires absorber la majorité des recettes fiscales. « Si cette dynamique n’est pas maîtrisée, il ne restera presque rien pour financer les infrastructures et soutenir le développement », a prévenu Daniel Mukoko Samba, le Ministre de l’Economie, en appelant à des « actions courageuses » pour contenir cette tendance.
Au-delà des indicateurs macroéconomiques, la question centrale demeure : quand cette stabilité monétaire se traduira-t-elle par une baisse tangible des prix sur les marchés ? Car pour la majorité des Congolais, la santé de l’économie ne se mesure ni dans les bilans de la Banque centrale, ni dans les graphiques du CCE, mais dans le prix du sac de farine, du litre d’huile ou de la botte de légumes. Tant que ces prix resteront élevés, la confiance populaire restera fragile, quel que soit le raffermissement affiché du franc congolais.
La réunion du CCE trace une feuille de route ambitieuse : raffermir la monnaie, protéger les dépôts et rationaliser les finances publiques. Toutefois, l’enjeu clé demeure la traduction de ces mesures dans le panier de la ménagère. C’est sur le terrain dans les marchés populaires et auprès des ménages que se jouera la crédibilité de la politique économique du Gouvernement Suminwa.
Un franc fort doit rimer avec des prix stables. Sans cela, la victoire économique restera symbolique, loin de la réalité des Congolais.
Alemwa Ibango Yasmine