Le président Paul Biya, 92 ans, a été réélu pour un huitième mandat à la tête du Cameroun, selon les résultats officiels proclamés ce lundi 27 octobre par le Conseil constitutionnel. Au pouvoir depuis 1982, il a obtenu 53,66 % des voix, contre 35,19 % pour son principal rival, Issa Tchiroma Bakary.
Sans surprise, cette victoire confirme la longévité du plus ancien chef d’État en exercice au monde. Mais le scrutin, organisé le 12 octobre, a révélé un taux de participation de 46,31 % et une opposition plus combative qu’attendu. Issa Tchiroma, ancien ministre et porte-parole du gouvernement, a revendiqué sa propre victoire, affirmant avoir remporté 54,8 % des suffrages, selon ses propres chiffres.
À Douala, la capitale économique, des manifestations de soutien à l’opposant ont dégénéré dimanche. Le gouverneur de la région du Littoral a fait état de quatre morts, tandis que des témoins rapportent des tirs à balles réelles après des salves de gaz lacrymogènes. Dans le nord du pays, à Garoua, Issa Tchiroma a évoqué la mort de deux de ses partisans autour de son domicile, affirmant que des snipers étaient positionnés sur les toits.
Depuis la veille de l’annonce des résultats, la circulation a été restreinte et les rassemblements interdits dans plusieurs grandes villes. Des patrouilles mixtes de police et de gendarmerie sont visibles dans les rues de Yaoundé, où plusieurs commerces et stations-service sont restés fermés par crainte d’incidents.
Les résultats ont été publiés quinze jours après le scrutin, conformément au code électoral, à l’issue de l’examen de plusieurs recours que le Conseil constitutionnel a tous rejetés. Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti au pouvoir, a salué une victoire « claire et légitime » et dénoncé les accusations de fraude de l’opposition.
En revanche, Issa Tchiroma Bakary a qualifié le scrutin de « mascarade électorale », estimant que le peuple camerounais « n’acceptera jamais la validation d’un bourrage des urnes ». Il a de nouveau appelé ses partisans à manifester pacifiquement contre ce qu’il considère comme une confiscation du vote populaire.
Vendredi, deux présidents de partis membres de la coalition soutenant Tchiroma ont été interpellés : Djeukam Tchameni, du Mouvement pour la démocratie et l’interdépendance au Cameroun (MDI), et Anicet Ekane, du Mouvement africain pour la nouvelle indépendance du Cameroun (Manidem).
Le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a dénoncé ces appels à manifester, accusant leurs initiateurs de vouloir « créer les conditions d’une crise sécuritaire » et de participer à « un projet insurrectionnel ».
À 92 ans, Paul Biya reste le deuxième président de l’histoire du Cameroun indépendant, après Ahmadou Ahidjo. Il a traversé les crises économiques, les rébellions politiques et le conflit séparatiste dans les régions anglophones, qui perdure depuis 2016. Malgré les contestations, le chef de l’État conserve une emprise totale sur l’appareil politique et sécuritaire du pays.
Alemwa Ibago Yasmine




