Présidentielle camerounaise : un mandat pour Paul BIYA, avec un score oscillant entre 53 ou 54 % des suffrages

    Le Cameroun retient son souffle. Comme à chaque élection depuis quatre décennies, les résultats ne surprennent plus vraiment : la Commission nationale de recensement des votes a donné, une fois encore, Paul Biya vainqueur. À 92 ans, le président sortant s’offre, selon les chiffres officiels, un nouveau mandat avec un score oscillant entre 53 et 54 % des suffrages.

L’opposition, elle, crie à la manipulation. Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre devenu rival, revendique sans détour une victoire « écrasante » et parle d’une « sanction claire du régime ». Dans une vidéo de cinq minutes diffusée sur les réseaux sociaux, le ton est ému, la posture presque messianique : il se veut le visage d’un renouveau. Mais au Cameroun, la victoire ne se proclame pas sur internet. Elle se valide dans le secret des institutions.

Le Conseil constitutionnel devra confirmer les résultats d’ici au 26 octobre. En attendant, les tensions montent. À Yaoundé, Douala, Garoua, la présence des forces de sécurité s’est renforcée. Dans certaines villes de l’Ouest, les manifestations de partisans de l’opposition ont viré à la violence. Les locaux du RDPC, le parti présidentiel, ont été incendiés. La réplique du pouvoir, elle, est ferme : « L’attitude irresponsable et arrogante du candidat Issa Tchiroma sera traitée avec rigueur », prévient le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji.

Rien n’a vraiment changé. Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, règne sur un pays dont la majorité des citoyens n’a connu que lui. À chaque scrutin, la même mise en scène : un président lointain, presque spectral, surgissant le temps d’un meeting. Une opposition dispersée, souvent étouffée. Un pays partagé entre lassitude et résignation.

Et pourtant, quelque chose s’effrite. Le contraste entre la ferveur populaire autour de Tchiroma et le calme olympien du chef de l’État trahit peut-être une fatigue du pouvoir, un essoufflement du mythe. Le Cameroun, malgré la stabilité vantée par le régime, reste l’un des pays les plus jeunes d’Afrique. Ses aspirations, elles, ne sont plus celles de 1982.

Si Paul Biya entame bien un huitième mandat, il le fera à l’âge où d’autres s’éloignent du monde. Le vieux président, fidèle à son style distant et impassible, semble pourtant prêt à continuer. Comme si le temps lui-même, au Cameroun, s’était arrêté.

Yasmine Alemwa Ibango

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